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Les 8 terrains du projet Mouve sont choisis pour :
  -   étudier des situations diversifiées quant aux paysages, à la dynamique de l'élevage et aux pressions qui s'exercent sur la production et l’environnement.
  -   avoir, dans chaque terrain, des équipes à même de développer des investigations communes.

Deux terrains en Amérique du Sud

Sur ces terrains, une grande partie de l’espace forestier a été colonisé par les troupeaux et les sociétés se revendiquent d’une culture d’éleveurs. Le contexte d’économie libérale et l’ouverture vers les marchés d’exportation aux prix instables exacerbent le rapport à l’incertitude des éleveurs. Ce contexte a produit une différentiation des formes d’exercice de l’agriculture opposant, dans les discours, une agriculture productiviste capitalistique et une agriculture familiale. Dans les deux cas, l’enjeu foncier (accès à la propriété) est très fort.

- En Amazonie (Brésil)

Le terrain Amazonie concerne trois territoires très contrastés : Redenção, Paragominas et Altamira, trois fronts pionniers d’âges différents. L’élevage, extensif, prend le pas sur la forêt.
La grande diversité des systèmes d'élevage et systèmes d'activités s'organise autour de deux archétypes. Les fazendas, grandes exploitations spécialisées en élevage viande de type ranch sur prairies cultivées, fonctionnent en grande partie avec une main d’œuvre salariée. Les élevages familiaux correspondent à de petites exploitations où l’élevage n’est qu'une composante d'un système diversifié, y compris hors agriculture.
Dans les deux cas, de nombreux pâturages se dégradent, soit par envahissement soit par épuisement du sol. Mises en œuvre dans les savanes, des techniques fondées sur l’utilisation d’intrants chimiques et le semi-direct permettent de multiplier les revenus par hectare tout en récupérant la fertilité des sols et en plantant des arbres fruitiers ou des arbres de valeur. Cependant cela correspond à un saut technologique important, rarement à portée des éleveurs.

- Dans la Pampa (Uruguay)

Au cours des trois dernières décennies, la Pampa a connu un fort exode rural. Cette tendance est aujourd’hui contrecarrée par le développement de l’agrobusiness (plantations forestières, agriculture d’exportation) qui s’accompagne pourtant d’une explosion du prix du foncier rural.
L'activité d'élevage est composée de systèmes bovins laitier ou viande et de systèmes ovins viande. Ces systèmes, à dominante pastorale, sont à chargement faible. Les exploitations agricoles sont très diversifiées, allant d'exploitations familiales à des ranchs de plusieurs milliers d'hectares. Dans le système gaucho traditionnel, l’élevage est l’activité centrale à laquelle peuvent être associées d’autres activités telles que la culture de céréales ou de légumineuses (soja). Face à la demande de location de terres par l’agrobusiness et les plantations forestières, plusieurs formes d’association et d’intégration agriculture-élevage voient le jour. Un des schémas les plus classiques est la location d'une partie des terres de l'exploitation à une entreprise forestière ou à un "pool de siembra".

Un terrain en Afrique Subsaharienne : le Sahel (Sénégal)

Le Sahel est marqué par des risques récurrents de sècheresses et de crises sanitaires. L'élevage extensif (bovin, ovin et caprin) est très présent. Il permet à plusieurs millions de personnes de vivre dans ces milieux difficiles.
Le terrain correspond au bassin de collecte de la Laiterie du Berger (LDB) qui concerne plusieurs centaines de petits producteurs dans un rayon de collecte de 35 km autour de l’usine.
Dans ce secteur, on observe une croissance du commerce des produits animaux en lien avec le développement de la demande urbaine. A la production laitière locale insuffisante, irrégulière et coûteuse en transport se substitue, sur le marché urbain de masse, le lait en poudre importé bon marché et dont l’approvisionnement est garanti toute l’année. Ceci entrave partiellement les dynamiques locales de collecte de lait. Un marché de niche pour les produits laitiers locaux, gras et typés, se développe toutefois auprès d’une population aisée. Récemment, on constate un effort des pouvoirs publics en faveur de la vérification de la qualité sanitaire des produits animaux (lait et viande).

Deux terrains dans le Bassin Méditerranéen, berceau du pastoralisme

- Au Maroc : l'arganeraie

Sur tout le territoire de l’arganeraie, les activités familiales concernent essentiellement l'élevage de caprins et l’élaboration de l’huile d’argan. Les élevages, extensifs, permettent la production de viande de chevreau, dont la demande est soutenue mais dont les débouchés sont encore à organiser. En parallèle, la reconnaissance en IGP de l’huile d’argan introduit un déséquilibre dans les activités familiales. Le système d’activités semble perturbé dans la mesure où les deux co-produits (huile, viande de chevreau) ne disposent plus d’un statut équivalent. Les tenants de l’huile d’argan ainsi que les agents des services forestiers ont une approche très défavorable de l’élevage caprin, accusé de dégrader les arbres et d’être incontrôlable (venue d’éleveurs étrangers à la zone). La dynamique semble donc à la dissociation des activités et à la simplification des usages de l’éco-système.

- Dans l'arrière pays méditerranéen français

Ce terrain se compose de deux zones : les Préalpes et les Cévennes méridionales gardoises et lozériennes. La zone des Préalpes (entre 800 m et 3000 m d’altitude) s'étend sur 1650 km² et est centrée sur la haute vallée du Verdon. Les paysages de forêt et de pelouse d'altitude y sont prégnants. Dans les Cévennes, les reliefs sont très accentués et l’espace est découpé en de nombreuses vallées encaissées. La gestion de l’eau, trop abondante à certains moments de l’année et qui fait défaut en été, est déterminante dans la mise en valeur du milieu. Sur ces deux zones, la pression foncière et touristique conduit à un nouveau maillage des territoires et à des problèmes de gestion des espaces résiduels à risque. L'agriculture se caractérise par des systèmes agropastoraux basés sur des élevages ovins agneaux, bovins allaitants, caprins fromagers et laitiers. La vente directe, les circuits courts et le sylvopastoralisme émergent. Depuis 10 ans, les productions se sont diversifiées, les périodes de production se sont décalées et les effectifs se sont concentrés. Le nombre de fermes se maintient, ainsi que les UGB totales, avec des substitutions entre espèces. Le chargement moyen est inférieur à 1 UGB / ha. L'élevage joue un rôle environnemental par le maintien des milieux ouverts : conservation d'habitats (biodiversité), paysage (tourisme), protection de la forêt contre les incendies.

Trois terrains de Montagnes Humides Françaises

Les systèmes agraires de ces territoires valorisent une complémentarité de ressources organisées selon des gradients d’altitude. L’élevage, associé à des signes de qualité, est très fortement attendu sur des questions de gestion de la biodiversité et de maintien de paysages ouverts, support d’une vitalité économique des campagnes soit très urbanisées et soumises à la pression touristique (Alpes, Pyrénées), soit beaucoup plus rurales et interrogatives sur les voies du développement économique (Livradois – Forez).
- Dans le Vercors

Le Parc Naturel Régional du Vercors recouvre 85 communes. Il a connu un fort exode rural jusque vers 1970. Depuis, la population s’accroît sur la zone des Quatre Montagnes, qui devient la « banlieue verte » de Grenoble. L'agriculture est très diversifiée, avec de petites régions aux agricultures plus « orientées » : le Plateau avec un élevage bovin laitier dominant inscrit dans l’AOP Bleu du Vercors-Sassenage ; le Diois, où l'élevage est une composante indissociable d'un système diversifié (systèmes ovins pastoraux ou caprins avec vigne, plantes aromatiques et médicinales,..) ; le Trièves avec de la polyculture-élevage ; le Royans avec prédominance de la culture du noyer (AOP Noix de Grenoble). Sur les "Hauts-plateaux", le pastoralisme est marqué par la présence de grands troupeaux transhumants.

- Dans le Livradois-Forez

Le Parc Naturel Régional du Livradois-Forez est situé en bordure est du Massif-central. Il couvre 322 000 hectares avec une population d'environ 110 000 habitants. L’enjeu du maintien d’une dynamique rurale est prégnant, dans un contexte d’enclavement et de conditions agro-pédoclimatiques difficiles (sol pauvres, parcellaire morcelé, altitude). Comprenant deux massifs de moyennes montagnes – Livradois et Forez– très forestiers et des zones de plaine où se concentrent la population et les activités, ce territoire rural traditionnellement tourné vers l’élevage présente une diversité de milieux et de paysages. Les enjeux environnementaux et paysagers diffèrent selon les zones : préservation du bocage, des pelouses d'altitude, ou de l'ouverture des paysages. L’élevage est largement basé sur l’herbe (2/3 de la SAU est en STH) et majoritairement bovin même si une grande diversité d’orientation existe : bovin lait, bovin viande, ovin viande, mais aussi des systèmes mixtes et quelques élevages caprins. Les exploitations sont de petite taille (33 ha en moyenne), et ont des surfaces fortement morcelées. Une tradition d'agriculture pluriactive se maintient en lien avec le tissu industriel et artisanal local, aux côtés de grandes structures agricoles. Les éleveurs bénéficiaient jusqu’à présent d’un maillage de structures locales de transformation des produits agricoles (laiterie, abattoir, etc.), qui est en cours de restructuration.

- Dans les Pyrénées

Le terrain Pyrénées est composé de 2 ‘sites d’intérêt’ : l'étage de montagne, nommé ‘Montagnes de Bigorre’, est situé dans le Parc National des Pyrénées et l'étage de piémont collinéen, nommé ‘Vallées et Coteaux de Gascogne’, fait partie du réseau international des sites de recherche à long terme en écologie (LTER). La zone de montagne est caractérisée par des systèmes d'élevage pastoraux (ovins viande et bovins allaitants). La déprise agricole y a entraîné le développement de boisements spontanés au détriment des prairies naturelles. Ce processus met en péril la durabilité de l’élevage, de paysages à haute valeur patrimoniale, et le maintien d’une biodiversité élevée. L'agriculture des Coteaux est caractérisée par le maintien d’une polyculture-élevage traditionnelle. Des systèmes spécialisés se sont aussi développés sur la zone : systèmes bovins allaitants plus extensifs, des systèmes bovins laitiers plus intensifs et des systèmes de grandes cultures. Si une agriculture 'plus intensive' peut être conduite dans les fonds de vallée, drainés et irrigués, les zones de crêtes peu mécanisables sont plutôt orientées vers les productions fourragères destinées aux bovins. Parallèlement à l’évolution de l’agriculture, la dynamique des paysages des Coteaux est en grande partie contrôlée par les pratiques de transmission des exploitations spécifiques des « sociétés à maisons » qui en préservent le caractère bocager. Bien que la population rurale se soit maintenue au cours des dernières décennies sur les deux sites, la part de la population agricole a fortement régressé. Les coûts de l’immobilier et du foncier se sont fortement accrus. En contrepartie, les populations urbaines et touristiques (en montagne) contribuent à un accroissement de la demande de produits et de services qui peuvent être fournis par des agriculteurs (vente directe, gites, paysages, biodiversité, randonnées, etc.).